Un poème de Verlaine
paru d'abord dans la Revue Blanche (1894) puis dans Dédicaces
(1894) : |
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Voici des cheveux gris et de la barbe grise. Tu me les demandais en un jour d'enjouement Pour, disais-tu, les encadrer bien gentiment Autour de ce portrait Pauvre photo ! Quand mes yeux fatigués se seront clos dûment Et que la terre bercera son fils dormant, Ou Faire, par un coiffeur de choix, sur les fonds peints D'avance, le tombeau, lors pleuré sans astuce, Du jeune homme qu'il aurait fallu que je fusse. |
À l'aimée Voici des cheveux gris et de la barbe grise. Tu me les demandais en un jour d'enjouement Pour, disais-tu, les encadrer bien gentiment Autour de ce portrait où ma "grâce" agonise. Pauvre photo ! Mais j'y pense, il sera de mise, Quand mes yeux fatigués se seront clos dûment Et que la terre bercera son fils dormant, Il sera de saison alors, chérie - exquise Attention ! - de faire avec ces cheveux, teints, À cette barbe, teinte en boucles blondes, brunes Ou telle autre nuance entre tant d'opportunes, Faire, par un coiffeur de choix, sur les fonds peints D'avance, le tombeau, lors pleuré sans astuce, Du jeune homme qu'il aurait fallu que je fusse. (Dédicaces 1894) |